Dans ce nouveau portrait, nous partons à la rencontre d’Annemarie Zahner, médiatrice institutionnelle depuis septembre 2023 au CPAS d’Ixelles. Elle nous raconte son parcours, les valeurs qui la guident et les défis de sa fonction. Avec sens de l’écoute et sensibilité humaine, elle agit comme trait d’union entre les usagers et l’institution.

Bonjour, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ? Je m’appelle Annemarie Zahner, j’ai 57 ans. Je suis mariée et maman de trois grands enfants âgés de 18, 20 et 22 ans. On me dit souvent que je suis d’un naturel optimiste, même si la vie n’est pas toujours un long fleuve tranquille. (sourire)

Quel est votre parcours professionnel jusqu’à votre arrivée au CPAS d’Ixelles ? J’ai étudié le droit avant d’intégrer le barreau de Bruxelles, portée par une forte sensibilité aux droits des plus vulnérables. Pendant plus de dix ans, j’ai exercé dans les domaines du droit pénal et de la protection de la jeunesse, des matières humaines et complexes qui m’ont profondément marquée. J’ai ensuite mis ma carrière entre parenthèses quelques années pour suivre mon mari à Paris. Durant cette parenthèse, je me suis investie pleinement dans la parentalité et me suis sensibilisée aux violences faites aux femmes. En 2013, de retour en Belgique, j’ai repris le barreau de Bruxelles, cette fois dans le domaine du droit de la famille.

Qu’est-ce qui vous a poussée à vous orienter vers la médiation ? Lors d’une audience, j’ai été frappée par une forme d’agressivité que je ne me reconnaissais pas. En entendant la partie adverse, j’ai réalisé que les situations humaines sont rarement manichéennes. Cela m’a poussée à entamer une formation de deux ans en médiation, tout en continuant à exercer en tant qu’avocate médiatrice. J’ai aussi mené des médiations en milieu carcéral, entre détenus et direction.

Qu’avez-vous retiré de cette expérience ? La médiation appelle un positionnement neutre, une écoute sans jugement. Le mot médiation vient de mediare, qui signifie « être au milieu ». Le médiateur n’est ni juge ni avocat, il est facilitateur. Après avoir complété cette formation par un coaching personnel et un certificat en coaching de vie, j’ai décidé de quitter le barreau en novembre 2022. Et peu après, j’ai découvert l’offre du CPAS d’Ixelles.

Quel est votre rôle aujourd’hui ? Je reçois les usagers, j’écoute leurs demandes ou plaintes, et je tente de clarifier les malentendus. Je reformule les griefs pour les transmettre aux équipes sociales. Parfois, je réponds à des questions ou j’oriente vers d’autres services. Dans la majorité des cas, la médiation permet de faire émerger une solution. Je joue aussi un rôle d’ombudsman : proposer des pistes d’amélioration du fonctionnement institutionnel. C’est ce que j’appelle le « comment mieux faire », une dynamique d’amélioration continue.

Comment conservez-vous une posture impartiale ? Je ne suis ni l’avocate des usagers ni la défenseure de l’administration. Je veille à ce que chacun respecte les règles et puisse s’exprimer. Je rappelle toujours ma neutralité, car c’est la condition pour que le dialogue reste possible.

Quels sont les défis principaux de votre fonction ? Créer, entretenir ou restaurer la confiance entre le CPAS et les citoyens. C’est un travail subtil, souvent invisible, mais essentiel.

Quelles qualités sont indispensables ? L’empathie, la capacité d’adaptation et la réactivité. Et surtout, l’envie de construire des ponts entre les besoins légitimes des usagers et les contraintes d’un service public.

Des pistes pour améliorer votre pratique ? Les échanges par mail sont pratiques, mais parfois insuffisants. Je crois beaucoup au pouvoir de la rencontre. C’est un chantier que j’ouvre : comment créer davantage de liens avec les équipes ?

Un mot de la fin ? Oui, un proverbe maori qui m’accompagne : « Tourne-toi vers le soleil, et l’ombre sera derrière toi. » Il est affiché sur mon frigo, c’est dire s’il m’inspire ! (rire)

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